vendredi 9 janvier 2015

C.D.D - extrait

C'était un parfum, prenant, sucré. Une fragrance qui lui allait si bien qu'on l'aurait cru pensée pour son cou. Je n'avais jamais vu cette personne, c'était mon deuxième mois dans l'entreprise, j'étais là pour gagner quelques sous, pas pour faire carrière. Je travaillais pour m'occuper, mes ambitions étaient toutes autres. J'allais suivre mon mari à l'étranger, on allait avoir une nouvelle vie, loin des enfants, devenus grands, en dehors de la ville.
Ce parfum, dès qu'il a effleuré mes narines… Oh, j'ai senti mon cœur se ramollir, se serrer, se renverser, sans que je ne sache pourquoi. Il m'a émue. Bouleversée. Touchée. Il a annulé toutes les autres odeurs pestilentielles qui régnaient dans cette cafétéria pourtant aseptisée.
Assise devant mon plateau en plastique qui suintait encore la machine à laver, moucheté de tâches et jauni par le temps, j'ai senti son parfum avant de sentir sa présence. Juste à côté de moi. A quoi pouvait ressembler quelqu'un qui portait un parfum si fort ? Un parfum qui me ramenait à l'enfance, qui me rendait femme, qui me donnait envie d'aimer, qui provoquait en mon bas ventre, des montagnes russes jamais envisagées. Un millier de fourmis me parcouraient l'échine. Je sentais mes fesses se serrer puis se desserrer sans que je ne leur ai rien commandé. Troublée par son parfum, par sa seule présence. J'avais envie de voir son visage. De mettre un sourire sur cette odeur. J'avais peur d'être déçue, aussi. Si je tournais mon regard sur la droite et que ses yeux, sa bouche, son cou, ses cheveux n'étaient pas à la hauteur de ce que je m'étais imaginée en respirant son odeur ? J'avais envie de savoir, de découvrir, de rencontrer. Apprécier sa voix, peut-être, aurait pu me suffire pour me faire une idée, mais je n'entendais rien. Simplement sa respiration, délicate, reposée.
Ma main gauche, accrochée à mon plateau, commençait à trembler un peu, je sentais la transpiration envahir ma paume. Ma main droite avait posée sa fourchette et essayait de contenir mon trouble, mon empressement, mon excitation.
D'un coup, dans une brise transportant encore un peu de son parfum, j'apercevais un mouvement venant de ma droite. Et dans l'instant même, je sentais la chaleur de sa peau sur ma cuisse. Sa main. Je baissais alors la tête vers ma ceinture et apercevais ses doigts, longilignes, fins. Ils remontaient le long de ma cuisse vers la braguette de ce jean dans lequel je me sentais maintenant vraiment à l'étroit. Une chaleur humide s'emparait de moi, de mon bassin. J'avais la sensation étrange, jusqu'alors inconnue, d'être en érection. Moi. Femme. Cela était-il seulement possible ? Je me sentais si vide, j'avais plus que tout le désir que ces doigts me remplissent. Là. Comme ça. Sans raison. Mon cœur se soulevait dans ma poitrine, ma respiration était saccadée. Assise là, dans cette cafétéria bruyante et malodorante, seule devant mon assiette, je prenais un plaisir coupable à me faire caresser la cuisse. Et puis le ventre, par une main et une odeur. Je restais interdite. Je ne savais que faire. Insupportable supplice. Parfaite douceur. Je m'abandonnais un instant et me permis de fermer les yeux.

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